lundi 18 juin 2012

Le Quintette pour clarinette et cordes de Brahms

Début 1891, Brahms assiste à un concert du jeune clarinettiste Richard Muhlfeld. L’été suivant, il compose simultanément un Trio pour piano, violoncelle et clarinette et un Quintette pour clarinette et quatuor à cordes.
 Deux Sonates pour clarinette et piano viendront compléter ce répertoire trois ans plus tard. Donné pour la première fois en public le 12 décembre 1891 à Berlin, le Quintette reçoit un accueil triomphal qui ne se démentira pas lors de la création à Vienne un mois plus tard.

Des quatre compositions avec clarinette, ce quintette reste la plus connue et la plus enregistrée. Chaleureuse et généreuse, elle échappe à cette mélancolie qui imprègne les opus tardifs de Brahms. C’est une porte d’entrée idéale dans la musique de chambre du compositeur allemand. L’alliage du timbre chaud de la clarinette et du soyeux des cordes est source de plaisir, pour peu que les interprètes et la prise de son soient à la hauteur.


Alfred Bovskovsky, Membres du Wiener Oktett (1961)  êêêê  ²²²²
A quoi peut tenir l’évidence absolue d’une interprétation, à commencer par le parfait équilibre entre les instruments et la clarté polyphonique malgré l’ampleur sonore de la clarinette ? Et que dire de l’acoustique, idéale ?  Nous touchons là à la quintessence de la musique de chambre. Dès les premières mesures, les musiciens sont au cœur de l’œuvre et y restent jusqu’ à la fin. Il y a dans cette lecture un lyrisme chaleureux et une douce tendresse teintée d’une pointe de mélancolie qui enchantent. Et lorsque le thème initial réapparait tout à la fin, on retient son souffle comme devant quelque chose qui, on le sait, ne reviendra plus. Ecouter pistes 5 à 9

Pascal Moraguè, Prazak Quartet (2005)  êêê  ²²²
La fermeté des traits frappe d’emblée. On retrouve ici cette épaisseur brahmsienne, souvent dénoncé par ses détracteurs. Sauf qu’ici cette option est défendue sans complexe,  jusqu’à une certaine opulence. La clarinette est magnifique : son galbé, couleurs chaudes, plénitude des phrasés. Le quatuor, parfaitement homogène est en osmose avec le soliste. Malgré tout, un rien de réserve, de raideur empêche l’œuvre de s’épanouir totalement. Ecouter plages 5 à 8

Sabine Meyer, Quatuor Alban Berg (1998)  êê  ²²²
Infatigables explorateurs d’un vaste répertoire, le Quatuor Berg nous livre une version charnue et contrastée. La profusion de détail est un rien démonstrative, ce qui peut se comprendre s’agissant d’un enregistrement de concert. Très grande artiste, Sabine Meyer a un peu de mal à trouver sa place, sauf dans le mouvement lent. Dommage car le jeu est superbe et l’instrument de velours. Mais voilà, tant de beauté soulignée par une acoustique brillante nous emmène sur la pente dangereuse du luxe, qui est l’ennemi de la musique de chambre. Ecouter plages 1 à 4

Thea King, Gabrieli string Quartet (1983)  êê ²²²²
Grande clarinettiste anglaise, Thea King offre une belle ossature au Quintette avec un jeu ample et nuancé. Le quatuor tisse un écrin tout en finesse mais qui manque de caractère. Les musiciens font ressortir toute la richesse de l’écriture, sans ce côté ostentatoire qui nous gêne chez le Quatuor Berg. C’est la qualité essentielle de cette version : la transparence et son principal défaut : un peu trop « cosy », comme un jardin anglais. Ecouter

Pascal Moraguès, Talich Quartet (1987)  êê  ²²²
Cette lecture tout en finesse ressemble à une calligraphie. La clarinette s’articule idéalement avec le quatuor. L’élégance discrète des cordes va de pair avec une certaine sécheresse. Pascal Moraguès ne déploie pas la même aisance qu’avec les Prazak. Les tempi sont mesurés, les couleurs pastel. Le style est impeccable mais manque de chair. Prise de son mâte en totale adéquation avec le caractère exigeant de cette version.


La version de référence



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